Une intelligence sans intention: ce que fait vraiment l’IA
Contrairement à l’intelligence humaine, qui implique conscience, subjectivité et capacité à apprendre de manière autonome, l’IA repose sur des modèles mathématiques entraînés sur des données. Elle ne comprend pas le monde mais elle le corrèle. Un modèle de langage comme GPT ne "sait" pas ce qu’il dit. En effet, il prédit la suite la plus probable d’un texte en fonction de milliards d’exemples qu'il a vu avant. De même, une IA de reconnaissance faciale n’identifie pas un visage, mais elle compare des motifs statistiques et essaie de trouver des similarités et des récurrences. Parler d’intelligence dans ce contexte revient à projeter nos propres capacités cognitives sur des systèmes qui n’en ont pas.
Quand on croit que les machines pensent comme nous
Quand on parle d’intelligence artificielle comme si elle pensait ou comprenait, on crée des illusions qui peuvent avoir des conséquences concrètes. Beaucoup imaginent des machines omniscientes ou menaçantes, capables de décisions autonomes, alors qu’il s’agit simplement d’outils qui analysent des données. Dans les PME, cette confusion peut pousser à croire qu’un chatbot "comprend" les besoins d’un client, alors qu’il ne fait que suivre des règles ou des modèles. Dans le monde académique, certains pensent qu’un détecteur d’IA peut parfaitement "deviner" si un devoir a été préparé par une machine, ce qui peut fausser des évaluations. En attribuant des intentions humaines à des algorithmes, on brouille les responsabilités et on complique les débats éthiques. Il est donc essentiel d’utiliser des mots plus justes pour mieux comprendre ce que l’IA fait réellement, et ce qu’elle ne fait pas.
Je vous invite à lire ce billet sur
l'IA générative et l'illusion créative
Vers une éducation numérique plus lucide
Pour sortir des malentendus qui entourent l’intelligence artificielle, il est essentiel de revoir la manière dont on en parle, que ce soit dans les médias, les écoles ou les entreprises. Le mot "intelligence" évoque spontanément des capacités humaines à comprendre, réfléchir et décider. Or, les systèmes que nous appelons "IA" ne font rien de tout cela. Ils analysent des données, repèrent des motifs et produisent des réponses en fonction de probabilités. En continuant à utiliser un vocabulaire trompeur, on entretient des illusions qui compliquent l’usage, la régulation et même la formation autour de ces outils.
Il serait plus juste de parler de modèles prédictifs, de systèmes d’aide à la décision ou encore d’outils d’automatisation. Ces termes décrivent mieux ce que font réellement les algorithmes: ils assistent, orientent, mais ne pensent pas. Cette précision lexicale permet aux utilisateurs de mieux cerner les limites techniques, les risques éthiques et les usages pertinents. Elle aide aussi à poser les bonnes questions du genre: qui contrôle le modèle ? sur quelles données est-il entraîné ? quelles décisions peut-il influencer ?
Adopter un langage plus rigoureux, c’est aussi une démarche pédagogique. Cela permet de former les citoyens, les professionnels et les décideurs à interagir avec l’IA de manière éclairée, sans fantasmes ni peur excessive.